[Article paru dans PARIS-NORMANDIE du 11/10/2016]
La scène s’annonce peu commune. Ce matin, à 9 h 30, les agents de la Poste accueilleront avec toute la bienveillance d’usage le président du tribunal de grande instance du Havre au centre de tri de la ville basse, rue Amiral Courbet, probablement débloqué. Ils entameront leur 30e jour de grève pour réclamer l’abandon d’un projet de mise en place d’une pause méridienne et de suppression d’une prime de collation.
Le magistrat a, en effet, décidé hier midi, de laisser du temps au temps et de tenter, à nouveau, de mettre sur pied une médiation entre postiers et direction régionale, appelant les deux parties d’un conflit dans l’impasse à s’asseoir autour de la table. Négociation qu’il compte bien voir démarrer jeudi. Peut-être, enfin, l’occasion de croire en un retour à la normale dans les prochains jours.
La tension était pourtant à son paroxysme quelques heures auparavant. À la demande de la direction de la Poste, deux syndicalistes, Bruno Venuat (secrétaire CGT-Fapt 76) et Sylvain Sigurani (SUD-PTT), étaient assignés auprès du TGI du Havre pour se voir prononcer un jugement en référé d’heure à heure (une procédure d’exception mise en œuvre uniquement dans les cas graves et urgents) les appelant à libérer l’accès des sites bloqués des rues Capuchet et Courbet.
Hier midi, le président du TGI renvoyait l’audience à demain jeudi (11 h), ne se prononçant pas sur la demande d’expulsion des grévistes de la Poste et membres d’autres syndicats. Si une médiation n’avait effectivement pu se mettre en place d’ici demain, c’est vendredi que le magistrat statuerait sur la procédure en référé.
« Le président a rendu une décision qui me paraît sage, de privilégier la voie de la négociation plutôt que d’ordonner l’expulsion des grévistes », se félicitait Me Capron, avoué des deux syndicalistes.
Selon Bruno Venuat, « c’est positif. On est depuis le début dans la recherche d’une sortie de conflit. C’est la Poste qui reste campée sur ses positions. Et c’est déplorable pour la population havraise comme pour les salariés en grève. Les collègues grévistes vont prendre conscience qu’il y a une prise en compte de leur démarche. »
« Oui c’est dommage qu’il faille en arriver là », regrette Sylvain Sigurani. « On jouait au jeu du chat et de la souris avec la Poste. Le président aurait pu prononcer l’expulsion. Mais si nous n’étions pas partis, que ce serait-il passé ? »
Pour autant, comme le note la direction régionale de la Poste, « la médiation est déjà en place. Elle a débuté auprès de la Direccte (Inspection du travail). Néanmoins, la mise en place de blocages a rendu impossible sa poursuite. Et ce malgré une première ordonnance émise le 27 septembre, déjà par le président du TGI. L’arrêt des blocages est la condition à la reprise du dialogue. La constater dès aujourd’hui serait un bon signe. Mais si elle ne devait pas l’être par le président du tribunal, la suite lui appartiendrait. »