Le constructeur automobile a été condamné, lundi, à indemniser 91 ex-salariés de l’usine de Sandouville, dont le congé de reclassement fantôme dissimulait un plan de préretraite déguisé.
Victoire pour les ex-salariés Renault de Sandouville : lundi, le tribunal des prud’hommes du Havre a condamné le constructeur automobile à indemniser 91 anciens salariés débarqués par le biais d’un plan de départs volontaires entre 2008 et 2009 pour non-respect des obligations liées au congé de reclassement. « Sur les 91 clients que je défends, aucun n’a retrouvé du travail : c’est statistiquement impossible quand de réels efforts de reclassement sont faits par l’employeur », explique Me Nicolas Capron, collaborateur au cabinet Baudeu et Associés, qui défend les anciens de Renault. Et pour cause : le plan Renault volontariat (PRV) était surtout utilisé par la marque au losange comme un plan de préretraite déguisé.
« On appelait ça les préretraites Assedic », se souvient Nicolas Guermonprez, délégué CGT dans l’usine de Sandouville. Le syndicat est à l’origine, avec un collectif d’anciens salariés, de la plainte devant les prud’hommes. « La direction convoquait les salariés proches de l’âge de la retraite pour leur proposer de partir avec neuf mois de congé de reclassement, et trois ans d’indemnisation par Pôle emploi, ce qui devait nous amener à une retraite à taux plein », se souvient Jean-Louis Lefebvre, l’un des plaignants. D’après la CGT, sur les 1 350 salariés qui ont quitté l’usine dans le cadre du plan Renault volontariat, 650 seraient des salariés seniors. « En guise de formation, j’ai eu droit à deux jours de jardinage pour apprendre à planter des salades », se souvient Jean-Louis Lefebvre, qui dresse une liste des « formations » proposées, qui s’apparente plus à un catalogue d’activités de centre social : bricolage, permis bateau, sculpture sur bois… Surtout, l’allongement de la durée de cotisation instaurée par la réforme des retraites de 2010, que les salariés seniors n’avaient pas prévu au moment de leur départ, a créé des périodes de carence pour certains d’entre eux. « Renault avait calculé pile-poil pour qu’ils arrivent jusqu’à l’âge de la retraite. À cause de la réforme de 2010, on a recensé 212 personnes qui risquent de se retrouver sans aucune indemnisation pendant quelques mois », explique Nicolas Guermonprez. La période de non-couverture atteindrait jusqu’à dix-huit mois pour certains salariés, d’après Me Capron. Outre les 20 000 euros d’indemnités par salarié que Renault a été condamné à verser lundi au titre de « préjudice moral et anxiété », le constructeur automobile devrait également s’acquitter de l’indemnisation de ces périodes de carence, dont le montant devra être fixé à l’occasion d’une nouvelle audience, le 23 novembre. Une procédure similaire a été entamée par des ex-salariés de l’usine de Flins.